Burkina Faso : Plus de 40% des adultes souffrent de l’hypertension artérielle

Dr Jacob Sawadogo, cardiologue

Dr Jacob Sawadogo, cardiologue

Maladie qui touche probablement le plus grand nombre de personnes dans le monde, l’hypertension artérielle (HTA) se définit comme une pression artérielle systolique supérieure ou égale à 140 millimètres de mercure et  ou une pression artérielle diastolique supérieure ou égale à 90 millimètres de mercure. Au Burkina Faso, les études ont montré que dans la population adulte, plus de 40% de personnes souffrent de l’HTA. Des chiffres qui ont tendance à augmenter avec l’âge. A l’occasion de la Journée mondiale de l’hypertension artérielle célébrée le 17 mai, Dr Jacob Sawadogo, cardiologue à l’hôpital Schiphra s’exprime sur les manifestations, les facteurs de risques, les complications et le traitement de cette maladie qualifiée de “tueur silencieux”.

Bendre : Comment l’HTA se manifeste ?

Jacob Sawadogo (JS) : Il n’y a pas de signes propres à l’HTA et c’est toute la problématique. D’où l’appellation des anglo-saxons, « Le tueur silencieux » parce qu’on peut faire de l’hypertension très sévère et ne présenter aucun symptôme. Mais quelques fois, il y a des symptômes : les céphalées le plus souvent frontales, matinales qui peuvent varier en fonction des sujets. Des céphalées qui sont soulagés au début par des antalgiques, mais qui peuvent résister après. Il y a aussi des bourdonnements d’oreille, un flou visuel comme un voile au niveau des yeux. Ce sont des symptômes qu’on peut rencontrer, mais qui ne sont pas propres à l’HTA et qui ne sont malheureusement pas rencontrés dans toutes les situations d’HTA. Très souvent, ce sont les complications qui vont faire remonter jusqu’au diagnostic de l’HTA.

Bendre : Quels sont les facteurs de risques ?

JS : Il y a deux grands groupes : le groupe des facteurs de risque non modifiables et celui des facteurs de risque modifiables.

Les facteurs de risques non-modifiables sont les facteurs sur lesquels nous ne pouvons absolument rien faire. Il s’agit des facteurs liés à l’âge qui est le facteur le plus déterminant, des facteurs liés au sujet lui-même et à sa génétique.

Les facteurs de risques modifiables sont de plusieurs ordres :

  • La consommation excessive de sel de cuisine : selon l’OMS (Organisation mondiale de la santé, Ndlr), il faut consommer 4 à 6 g de sel par jour. Dans nos ménages, on est quelque fois à 12 g voir 18g peut-être par personne, voir plus par jour ;
  • L’obésité tout comme le surpoids ;
  • Le diabète ;
  • La sédentarité (est sédentaire celui qui ne fait pas au moins trois jours d’activité physique sportive par semaine)
  • Le stress ;
  • Le trouble de métabolisme des graisses (dyslipidémies)
  • Le tabagisme (quelle que soit la forme)
  • La consommation excessive d’alcool.

Bendre : Quelles peuvent être les complications de l’HTA ?

JS : L’HTA, quand elle n’est pas prise en charge, peut entrainer des complications qui existent à plusieurs niveaux :

– Les complications au niveau du cerveau : un AVC (Accident vasculaire cérébrale) qui est la complication qu’on rencontre souvent, quoi que l’HTA ne soit pas la seule cause de tous les AVC ;

– Au niveau des yeux : La rétinopathie hypertensive

– Au niveau du cœur : insuffisance cardiaque, une cardiopathie istémique ;

– Au niveau des vaisseaux : athérosclérose, ischémie aigue ou chronique

– Au niveau rénal : insuffisance rénale chronique.

Bendre : comment traiter l’HTA ?

JS : Il se fait à plusieurs niveaux. Le premier niveau de traitement, c’est ce qu’on appelle les mesures hygiéno-diététiques. Il faut que le patient réduise la consommation de sel, d’alcool, qu’il arrête de fumer. Il faut qu’il travaille à perdre du poids (pour les sujets obèses ou en surpoids), il faut qu’il évite la sédentarité (c’est-à-dire pratiquer une activité physique sportive au moins 3 fois par semaine). Ces mesures s’appliquent à toute personne qui fait de l’HTA quel que soit le degré.

Ce premier niveau suffit pour certaines personnes à normaliser leur tension artérielle sans médicaments. Mais si au bout de trois mois on n’a pas les résultats, on doit compléter avec des médicaments antihypertenseurs qui ne viennent pas remplacer ces mesures, mais qui viennent les compléter.

Il peut arriver qu’on mette immédiatement le patient sous traitement médicamenteux dès le premier jour.

La décision de traitement tient compte du risque global du patient.

Il y a d’autres type de traitement, notamment le traitement chirurgical qui consistait à faire la dénervation rénale, c’est-à-dire supprimer les nerfs au niveau des reins pour agir sur la tension artérielle. Mais ce ne sont pas des pratiques qui sont courantes.

Pour les HTA secondaires, il y a le traitement de la cause.

Certains patients pensent que, parce qu’ils sont jeunes et comme le traitement de l’HTA est à vie, ils ne vont pas commencer tout de suite à prendre le traitement. Ils veulent retarder parce qu’ils estiment que c’est trop précoce. Il faut savoir que ce n’est jamais trop tôt pour commencer un traitement si c’est une hypertension avérée. Plus vite on commencera le traitement, mieux on préviendra les complications.

Bendre : Avez-vous des conseils pour les populations ?

JS : Pour ceux qui sont déjà hypertendus, il faut suivre son traitement, son régime comme il se doit ; et pour ceux qui ne le sont pas, il faut travailler à retarder au maximum l’échéance de l’hypertension ; sinon à éviter définitivement de faire de l’HTA.

  • Pratiquer une activité physique sportive
  • Réduire la consommation de sel
  • Réduire la consommation d’alcool
  • Arrêter le tabac sous toutes ses formes
  • Perdre du poids
  • Avoir une alimentation saine et équilibrée

 

Entretien réalisé par Madina Belemviré

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