Conférence sur les économies africaines : Le salut du continent noir ne viendra pas de Paris

Le sommet sur le financement des économies africaines organisé à Paris à l’initiative du président Emmanuel Macron s’est achevé mardi 18 mai. A l’heure du bilan, la principale annonce reste un soutien de la communauté internationale sur le plan sanitaire. Sur le plan financier, aucun n’engagement financier ferme n’a été pris. En clair, la relance des économies africaines devra encore attendre et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne pouvait pas en être autrement.

 

Il faut rappeler avant toute chose que l’objectif de ce sommet était de lancer un « New Deal » selon l’expression du président français, afin de relancer les économies africaines asphyxiées par les conséquences économiques de la pandémie de Covid-19. L’ambition était de récolter 100 milliards de dollars pour combler en partie le besoin de financement du continent. À l’issue du sommet, les participants n’ont pas annoncé d’engagement ferme sur ce plan financier, mais promis d’engager des discussions autour des « droits de tirage spéciaux » (DTS) du Fonds monétaire international. Équivalents à une planche à billets du Fonds monétaire international (FMI), ces actifs monétaires peuvent être convertis en devises et dépensés, sans créer de dette.

Ce constat d’un bilan mi-figue, mi-raisin vient rappeler une fois de plus que le salut du continent africain ne viendra pas de l’extérieur. Surtout pas de Paris. Il est clair en effet, que si l’aide internationale peut permettre un tant soit peu à l’économie du continent de se relancer, il n’en demeure pas que ce soutien ne saurait être une solution sur le long terme.

L’économiste camerounais Célestin Monga ne s’est d’ailleurs pas trompé. Dans un tweet railleur avant le sommet de Paris, ce dernier préconisait de s’attaquer aux flux financiers illicites – liés aux activités criminelles, à l’évasion fiscale et à la corruption – qui appauvrissent le continent. Les fuites de capitaux ont été estimées à 88,6 milliards de dollars par an, par la la Conférence des Nations unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED). Une évaluation qui serait bien en deçà de la réalité, selon certains spécialistes de la question. L’économiste camerounais, M. Monga, écrivait ceci sur son compte tweeter : « avant de partir en voyages exotiques à l’étranger pour quémander un pardon de la dette et plus d’argent, rappelez-vous ceci : chaque année, 87 milliards de dollars (3,7% du PIB de l’Afrique) quittent le continent (…). En 2000-2015, les flux illicites en provenance d’Afrique ont totalisé 836 milliards de dollars ».

 

La solution sera africaine ou ne sera pas

Financer les besoins de dépenses publiques supplémentaires, maîtriser la forte hausse de la dette publique et mobiliser davantage de recettes fiscales” est “le trilemme” auquel doivent faire face les responsables africains, selon le directeur du département Afrique du FMI. La communauté internationale peut les soulager “en fournissant des ressources qui permettront d’atténuer les difficultés posées par le trilemme, que ce soit sous la forme de dons, de financements à des conditions concessionnelles, d’une prolongation de l’initiative de suspension du service de la dette du G20 ou dans certains cas, de l’application d’un traitement de dette au titre du cadre commun correspondant (des règles ont été définies par le G20 et le Club de Paris)”, affirme Abebe Aemro Selassie. Mais, poursuit-il, « c’est à l’Afrique subsaharienne de réaliser l’essentiel des efforts en faisant “des réformes audacieuses” qui passent, entre autres, par “une transparence accrue et des réformes de la gouvernance” en matière de dépenses publiques ».

En clair, au lieu d’aller à Paris quémander des fonds pour relancer les économies du continent, il est temps que les dirigeants africains trouvent les solutions à l’interne à travers une bonne gouvernance et des réformes nécessaires. La porte de sortie de l’Afrique sera endogène ou se sera pas.

 

Jean Pierre Sawadogo

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