Crise de l’apprentissage au Burkina Seuls de bons enseignants pourront relever le défi

Aujourd’hui, on entend de plus en plus parler d’une crise de l’apprentissage ou d’une baisse du niveau scolaire. Ce problème, s’il semble général à travers le monde, se pose avec acuité dans les pays en développement et le Burkina Faso ne fait pas exception. Mais s’il y a dans notre pays une crise de l’apprentissage, c’est tout simplement parce qu’il y a une crise de l’enseignement. L’actualité de ces derniers temps ou de ces dernières années l’illustre à souhait.

 

Cela n’est plus un secret pour personne. Le Burkina Faso à mal à son système éducatif. Si au début des années 2000, c’est l’enseignement supérieur qui était principalement touché par la crise, ce n’est plus le cas aujourd’hui où c’est tout le système éducatif qui est en souffrance. Ainsi, au primaire et au post-primaire, ceux qui sont chargés de l’éducation des enfants du peuple se « cherchent » comme on le dit trivialement. Ils recherchent en quelque sorte des meilleures conditions de vie et de travail qui sont selon eux, des facteurs sine qua non pour un meilleur rendement. Si cela est vrai, il n’en demeure pas moins que rien de garantie que de meilleurs salaires pour les enseignants sont des gages d’une éducation de qualité. En effet, pour que les élèves apprennent, il leur faut de bons enseignants. Et cela ne dépend pas du salaire. Pourtant, que ce soit dans notre pays ou dans d’autres en développement, les systèmes éducatifs ne se soucient guère de ce que savent les enseignants, de la façon dont ils font cours, voire de leur présence en classe. Combien sont par exemple les enseignants qui ont profité du contexte sécuritaire actuel pour déserter leur lieu de travail ? Certes, il y a heureusement dans notre pays des  enseignants dévoués et enthousiastes qui, malgré les difficultés, enrichissent et transforment la vie de leurs élèves. Ces héros surmontent tous les obstacles pour transmettre les savoirs avec passion, créativité et détermination. Pour preuve, en septembre dernier, l’Assemblée Nationale du Burkina a décerné la mention « honorable » à 95 enseignants ayant réalisé un taux de réussite de 100% à l’examen du Certificat d’études primaires (CEP), avec un effectif d’au moins 50 élèves en classe. C’était à l’occasion de la première édition de la Journée de reconnaissance du député à l’enseignant (JOURDEN) organisée le samedi 15 septembre 2018 à Ouagadougou. Mais l’arbre ne doit pas cacher la forêt.

Cela veut dire que tous les enseignants, mêmes ceux qui s’illustrent déjà parfaitement, ont besoin d’aide. Les autorités compétentes doivent d’une manière ou d’une autre, faire en sorte que tous les enseignants aient envie de donner le meilleur d’eux-mêmes et qu’ils disposent de ce dont ils ont besoin pour enseigner efficacement. C’est pour cela que de meilleures conditions de vie et de travail doivent leur être trouvées. Mais si le pays des hommes intègres veut gagner le pari d’un bon système éducatif, le véritable remède se trouve ailleurs. Il se trouve selon nous dans une réforme sans complaisance du corps enseignant. C’est dans ce sens d’ailleurs que le groupe de la Banque Mondiale à lancer une nouvelle stratégie baptisée « Enseignants performants, élèves performants ». Une s’agit d’une plateforme mondiale pour la réussite scolaire qui vise à rendre performant chaque enseignant, à conférer à ce métier un statut respectable et attractif, à mettre en œuvre des politiques de gestion du personnel efficaces, à fournir aux enseignants les savoir-faire et les connaissances nécessaires avant leur prise de fonction et à les accompagner au mieux tout au long de leur carrière.

Ce qu’il faut faire

En somme, pour offrir une éducation de qualité à tous les fils et filles du Burkina, il est temps de mettre en place un système éducatif qui, année après année, et dans toutes les écoles du pays, permet des milliers d’élèves d’apprendre. Mais pour que cela soit une réalité, il faut au préalable une volonté politique forte et de réelles capacités de mise en œuvre. Aujourd’hui, en dépit du nombre insuffisant d’enseignants, le Burkina Faso a du mal à exploiter efficacement les ressources humaines disponibles. Cela fait que l’augmentation des dépenses consacrées à l’éducation ne se traduit pas par une amélioration de l’apprentissage et du capital humain. Pour surmonter ces difficultés, il faut agir à tous les niveaux du système. Les pistes de solutions proposées par la Banque Mondiale peuvent être utiles pour le Burkina. Ainsi, à l’échelon central, les ministères de l’Éducation doivent recruter les meilleurs spécialistes pour concevoir et mettre en œuvre des programmes fondés sur des données probantes. Quant aux délégations régionales ou locales, elles doivent disposer des capacités et des outils nécessaires pour contrôler les acquis et soutenir le travail des établissements. Enfin, les directeurs d’école doivent être formés et préparés à gérer et diriger leurs établissements, de la planification de l’utilisation des ressources à la supervision et à l’accompagnement des enseignants. Certes, cela paraît difficile. Mais si le prix à payer pour résoudre la crise de l’apprentissage dans notre pays. Certains pays de l’Asie du Sud qui était dans la même situation que le Burkina ont pu relever le défi. Ils ont notamment mis l’accent sur la responsabilisation des écoles grâce au contrôle et à la réduction de l’absentéisme des élèves et des enseignants. Par ailleurs, un système de recrutement des enseignants fondé sur le mérite a été mis en place et seuls les enseignants les plus talentueux et les plus motivés sont sélectionnés. À la suite de ces réformes, le nombre d’élèves et le taux de rétention scolaire ont augmenté et la qualité de l’éducation s’est sensiblement améliorée.

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