Etablissements publics d’enseignement secondaire au Burkina Faso: Une privatisation qui ne dit pas son nom
Les établissements publics secondaire, primaire et préscolaire du Burkina Faso ne sont pas au mieux de leur forme. Les écoles, collèges et lycées souffrent d’un sérieux manque d’infrastructures et d’enseignants. A côté de ces problèmes traditionnels qui assaillent l’école burkinabè, les agissements de certains acteurs de la chaine éducative ne sont pas pour arranger les choses. Et pour preuve, certains établissements publics-un nombre assez important- foulent au pied les textes régissant les frais de scolarité. Ils encaissent plus que cela ne devait l’être. Les cotisations des Associations des parents d’élèves (APE) viennent en rajouter aux souffrances des parents d’élèves.
L’école est gratuite au Burkina Faso. Elle est obligatoire pour les enfants du pays jusqu’à l’âge de 16 ans. C’est une série de lois qui posent ces principes. Mais en réalité, ces textes législatifs ont été réduits à leur plus simple expression car les écoles publiques au Burkina Faso sont tout sauf gratuites. Constatant le désordre entretenu par certains établissements publics qui foulent au pied cette règle de la gratuité de l’école pour tous les enfants, la ministre en charge de l’économie et des finances d’alors, Rosine Coulibaly et son collège de l’éducation nationale, Jean Martin Coulibaly, ont signé un arrêté interministériel en février 2018 pour encadrer les frais d’inscription dans les établissements secondaires du Burkina Faso et donner les mêmes chances et droits à tous les enfants du pays des Hommes intègres. Selon cet arrêté interministériel en date du 12 février 2018, les frais d’inscription d’un élève admis au concours d’entrée en 6è s’élèvent à 2 500 francs. A cette somme s’ajoutent les frais d’abonnement à la bibliothèque de 500 francs et ceux de la location des manuels scolaires de 500 francs. Si ce texte était appliqué, chaque élève burkinabè reçu à l’entrée en 6è ne devrait débourser que la somme de 3 500 francs comme écolage à partir de cette année scolaire 2018-2019. Pour les élèves non admis à l’entrée en 6è mais recrutés en complément d’effectifs, les frais d’inscription sont fixés par le même texte règlementaire à 5 000 francs, plus la somme de 1000 francs au titre des frais de location des manuels scolaires et d’abonnement à la bibliothèque. Pour donc l’élève non admis à l’entrée en 6è recruté en complément d’effectif dans un établissement public, c’est en tout la somme de 6 000 francs qu’il doit reverser à l’intendance pour suivre tranquillement ses cours. Quant aux anciens élèves du premier cycle (5è à la 3è), ils doivent contribuer au titre des frais d’inscription, d’abonnement à la bibliothèque et de location des manuels scolaires à hauteur de 3 500 francs. Soit 2 500 francs pour les frais d’inscription et 1000 francs pour ce qui est des frais afférents à la bibliothèque.
Au second cycle, les frais d’inscription pour les élèves admis à l’entrée en 2nde sont de 5 000 francs. Le même montant est dû par les anciens élèves (1ère et Tle). Les élèves du second cycle de cette catégorie sont aussi tenus de verser une somme de 2000 francs supplémentaire à titre de frais d’abonnement à la bibliothèque et de location des manuels scolaires. Pour les élèves recrutés en complément d’effectisf dans les lycées et collèges publics du pays, leur frais d’inscription est fixé par l’arrêté interministériel à 15 000 majoré de 2 000 francs pour les frais de bibliothèque. Même si ce texte dans sa lettre et son esprit pourrait être en déphasage avec le principe de la gratuité de l’école annoncé tambours battants il y a maintenant une dizaine d’année, son application pourrait redonner du sourire aux Burkinabè moyens qui baignent dans la misère. Car l’écolage pour tout enfant burkinabè quel que soit son niveau (1er ou 2nd cycle) et son statut (affectés ou recrutés en complément d’effectif), serait compris entre 3 500 francs et 17 000 francs. Mais hélas !
Entrée en scène des Associations des parents d’élèves
Les Associations des parents d’élèves (APE), ont entre autres pour but de permettre aux parents d’élèves des établissements de travailler en synergie d’action avec tous les acteurs impliqués dans l’éducation, l’instruction et la formation de leurs enfants. Dans le principe, elles sont apolitiques et sans but lucratif. Le sens de ces APE, c’est d’amener chaque parent à s’impliquer davantage dans le suivi scolaire de son enfant et dans la vie de l’établissement. Mais certaines APE dans certains établissements publics du pays sont en porte à faux avec ces nobles objectifs de départ. La plupart des parents d’élèves et les élèves ne voient l’APE qu’en début d’année, pendant le paiement des frais de scolarité. En effet, les associations ont institué des cotisations ordinaires dont le montant atteint 15 000 francs dans certains établissements publics du pays. C’est donc dire que les frais APE font même le double, même le triple des frais d’inscription. Ce montant exorbitant a entrainé des volées de bois verts dans certaines localités du pays. Ce qui a obligé l’Union nationale des associations des parents d’élève du Burkina Faso (UNAPES-B) à prendre une lettre circulaire le 16 novembre 2016 à l’intention de tout bureau APE du Burkina. Le document précise : « Les cotisations ordinaires et statutaires sont de 5 000 francs par enfant et par année. Aucune cotisation ordinaire ne saurait dépasser ce montant. La seule et unique possibilité, c’est de pouvoir fixer des cotisations en dessous de 5 000 francs mais pas au-dessus de cette somme. Au regard des dérives et des abus constatés, je vous invite à suspendre les cotisations spéciales et à ne s’en tenir qu’aux cotisations ordinaires… ». Certains responsables APE dans certains établissements ont vite rangé cette lettre circulaire aux orties et poursuivent paisiblement le pillage des parents d’élèves. Pour le non-paiement des frais APE, les responsables des associations n’hésitent pas à mettre dehors les élèves sous le regard complice de l’Etat et de certains chefs d’établissement qu’ils mettent à profit. Les APE de certains établissements sont devenus des vaches à lait au profit de quelques individus.