Disparition d’Idriss Déby Itno : que deviendra la diplomatie militaire tchadienne ?

Alors que les obsèques du président tchadien Idriss Déby Itno décédé brutalement ce mardi se déroulent à N'Djamena, sa disparition plonge plusieurs pays africains dans une période d’incertitude. Le maréchal président était devenu en effet, un pion essentiel sur l’échiquier sécuritaire panafricain. L’intervention des forces armées tchadiennes sous Idriss Déby a été décisive sur plusieurs fronts, notamment au Sahel et au lac Tchad.

L'armée Tchadienne en dépit de ses insuffisances semble être la mieux aguerrie du G5 Sahel

Alors que les obsèques du président tchadien Idriss Déby Itno décédé brutalement ce mardi se déroulent à N’Djamena, sa disparition plonge plusieurs pays africains dans une période d’incertitude. Le maréchal président était devenu en effet, un pion essentiel sur l’échiquier sécuritaire panafricain. L’intervention des forces armées tchadiennes sous Idriss Déby a été décisive sur plusieurs fronts, notamment au Sahel et au lac Tchad.

Idriss Deby (Ph DR)

Plusieurs chefs d’Etat et de gouvernement assistent aujourd’hui à N’Djamena au Tchad, aux obsèques du président Idriss Déby Itno. Au-delà du fait que ces derniers ont fait le déplacement dans la capitale tchadienne pour dire adieux à un homologue président, nul doute que l’engagement personnel du maréchal président dans la lutte contre le terrorisme en Afrique centrale et au Sahel y est certainement pour quelque chose.

Pays charnière situé au carrefour sahélo-soudanien, le Tchad « apparaissait comme l’un des États relativement stables de cette “ligne de front” qui traverse l’Afrique du Soudan à la Casamance, opposant au nord des espaces islamisés et au sud une Afrique majoritairement animiste et chrétienne » explique le géographe Géraud Magrin. Il représentait également un « espace transitoire » entre l’Afrique noire et le monde arabe.

Selon de nombreux spécialistes, Idriss Déby a toujours rejeté l’islamisme politique et combattant pour des convictions personnelles. Pour joindre l’acte à la parole, celui qui dirigeait le Tchad depuis maintenant 30 ans a investi dans la diplomatie militaire en offrant les services de l’armée tchadienne dans la lutte contre boko haram et autres groupes terroristes qui menaçaient aussi bien le Tchad que d’autres pays de la sous-région.

Une armée hors du commun

Alors que les obsèques du président tchadien Idriss Déby Itno décédé brutalement ce mardi se déroulent à N'Djamena, sa disparition plonge plusieurs pays africains dans une période d’incertitude. Le maréchal président était devenu en effet, un pion essentiel sur l’échiquier sécuritaire panafricain. L’intervention des forces armées tchadiennes sous Idriss Déby a été décisive sur plusieurs fronts, notamment au Sahel et au lac Tchad.
L’armée Tchadienne en dépit de ses insuffisances semble être la mieux aguerrie du G5 Sahel

Dans la lutte contre le terrorisme, l’armée tchadienne était appréciée pour son efficacité au combat. Pour preuve, en 2013, N’Djamena a fourni un contingent de 2 000 hommes en appui aux forces françaises de l’opération « Serval » envoyées stopper l’offensive djihadiste dans le nord du Mali. Depuis août 2014, l’opération « Barkhane » a pris le relais ; le pays accueille son quartier général ainsi qu’une partie de ses 200 blindés, 6 avions de chasse et 3 000 militaires français stationnés en permanence. Plus près de nous, il y a quelques semaines, le président Idriss Déby avait envoyé 1200 de ses soldats combattre l’hydre terroriste au Sahel.

En 2016, Delphine Lecoutre du monde diplomatique expliquait qu’en dehors de l’Angola et du Rwanda, aucun autre État d’Afrique centrale ne disposait d’une puissance de feu équivalente ou supérieure à celle de l’armée tchadienne. Ses effectifs sont passés de 17 000 hommes en 1989-1990 à 25 350 en 2013. Les dépenses militaires représentaient 6,6 % du produit intérieur brut en 2011, contre 5,2 % pour l’Angola (2012) et 1,1 % pour le Rwanda (2013).

Toujours selon cette spécialiste des questions de gestion de conflits et de crises en Afrique, l’armée tchadienne a la réputation d’être aguerrie aux combats du désert. Elle s’est rodée dans les montagnes du Tibesti et de l’Ennedi, mais aussi à la frontière du Darfour. Ce savoir-faire lui a permis de s’imposer comme partenaire de Paris sur des théâtres d’opérations analogues, comme le massif de l’Adrar des Ifoghas au Mali. Le mythe de son invincibilité repose sur un fait d’armes : le raid lancé le 5 septembre 1987 par 2 000 de ses soldats contre la base aérienne libyenne de Maaten Es-Sara. Cette victoire sur des forces pourtant très supérieures en armement conventionnel et en effectifs avait alors contraint le colonel Mouammar Kadhafi à négocier.

Avec cette disparition du président Idriss Déby Itno qui avait fait de la lutte contre le terrorisme l’une des bases de la diplomatie tchadienne, une période d’incertitudes s’ouvre. Un retrait des troupes tchadiennes, même partiel engagées au Sahel pour faire face aux nouveaux défis internes n’est pas à exclure. Il faut espérer que le départ brutal de l’allié stratégique de la région soit un signal fort donné aux autres pays du G-5 Sahel pour prendre enfin leur destin en main.

Jean Pierre Sawadogo

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