NOUVELLE CONFIGURATION DU PAYSAGE POLITIQUE BURKINABE: Faut-il craindre pour la relève ?

Malheureusement, la configuration actuelle du paysage politique burkinabè formatée et dominée par la génération dite ‘’vieille classe’’ laisse peu de chance à l’émergence d’une future génération de politiciens matures, techniquement compétent et politiquement conscients

La configuration actuelle du paysage politique burkinabé laisse peu de place au bouillonnement  du débat politique contradictoire. Or, un tel débat est formateur pour les jeunes en politique. A tout le moins, il permet de jauger du niveau de maturité politique des jeunes. Face au risque de son défaut, l’on peut craindre pour la qualité de la relève générationnelle en politique dans notre pays.

 

La configuration actuelle du paysage politique du Burkina Faso offre de constater que la plupart des partis qui regorgent de jeunes percutants en politique se retrouvent au sein d’un seul camp, celui de la majorité présidentielle. En face, non seulement le peuplement général (en termes de nombres de partis) est faible, mais aussi l’émergence de jeunes capables de porter durablement la contradiction politique sur l’espace public n’est pas évidente.

Avec une jeunesse burkinabé de plus en plus adeptes à la courte échelle, surtout en politique, l’opposition politique burkinabè risque de ne pouvoir tenir la contradiction par l’intermédiaire de ses militants jeunes. En tout cas, la majorité présidentielle, en plus de sa forte assise de jeunesse, ne cesse d’accueillir des jeunes engagés – sincèrement ou par opportunisme – en politique. Le forum de l’Union nationale des jeunes (UNJ) du MPP (Mouvement du peuple pour le progrès, parti au pouvoir) tenu les 10 et 11 avril a été assez révélateur de cette situation. De toutes les contrées du pays, les jeunes ont accouru à ce forum où ripaille et argent ont coulé à flot.

A cette occasion, le Secrétaire national de l’UNJ/MPP, Ismaël Bachir Ouédraogo a appelé les jeunes de l’opposition et au-delà, à rejoindre le camp de la majorité pour soutenir la mise en œuvre du programme du président Roch Kaboré et pour favoriser l’effectivité de la réconciliation nationale. Cet appel sera-t-il suivi d’effets ? Possible, au regard notamment du contexte d’existence de toute l’opposition en mode modéré.

Déjà, le ton est donné par des jeunes de l’Union pour le progrès et le changement (UPC) de l’ex-chef de file de l’opposition politique passé à la majorité présidentielle et ceux du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) de l’actuel chef de file de l’opposition réunis au sein d’un Comité de réflexion et d’action pour la réconciliation et la paix (CRARP). Ainsi, les potentiels contradicteurs Moussa Zerbo de l’UPC et Alpha Yago du CDP, idoles de la majorité des jeunes de leur parti respectif, dissipent le vent de la contradiction politiquement constructive et formatrice. Avec cette instance, ils ont rejoint le chef de la jeunesse du MPP, Ismaël Bachir Ouédraogo. Si cela peut favoriser l’émergence d’une nouvelle classe politique moins belliqueuse, elle peut aussi influer négativement sur le processus de maturation politique des jeunes.

Avant qu’il ne soit trop tard

Il est évident que la saine contradiction idéelle en politique est source de lumière, et donc facteur de maturité. La maturité de la jeunesse en politique, le Burkina Faso en a besoin pour s’assurer d’une relève générationnelle conséquente. Comment susciter cette maturité en l’absence de bouillonnement de la contradiction entre jeunes en politique ? L’on peut se poser cette question, surtout quand on sait que même les écoles de formation politique créées par certains partis n’existent que de nom.

Il reste pourtant implacable que l’occupation efficiente de responsabilités politiques requiert la maturité, la technique, le professionnalisme mais surtout la conscience politique, patriotique et idéologique. Malheureusement, la configuration actuelle du paysage politique burkinabè formatée et dominée par la génération dite ‘’vieille classe’’ laisse peu de chance à l’émergence d’une future génération de politiciens matures, techniquement compétent et politiquement conscients. De ce fait, la probabilité reste forte pour le moment, que cette ‘’vieille classe’’ laisse le pays entre les mains d’apprentis politiques qui seraient peu consciencieux de leurs responsabilités face au peuple de qui, ils auraient obtenu leur position. Faut-il alors craindre pour la relève générationnelle en politique ? Raisonnablement, oui ! Mais, espérons une prise de conscience collective urgente avant qu’il ne soit trop tard.

 

Elie Paré

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