Subvention hors campagne: Les 500 millions qui divisent populations et politiciens

Une subvention consacrée par les textes, mais qui fait polémiques à chaque fois que les bénéficiaires passent à la caisse. Six partis politiques ayant obtenu au moins  3% de suffrages exprimés aux dernières élections législatives de 2015 ont reçu le 29 janvier dernier leurs chèques dans le cadre de la subvention hors campagne électorale. Chose banale autrefois. Mais depuis, l’opinion publique est vent debout contre la classe politique. Opposition et majorité parlent le même langage, soupent dans la même marmite. Contexte économique moribond oblige, désamour profond et manque de confiance entre la population et sa classe politique? En tout cas, ces 500 millions ne passent pas, et le débat doit être posé.

 

500 millions, c’est la coquette somme que se sont partagés six partis politiques au titre de la seule année 2018. C’est le MPP, parti au pouvoir, qui se taille la part du lion avec 218,5 millions de FCFA. Le principal parti de l’opposition l’UPC grappille  129,3 millions de FCFA alors que  le CDP s’en tire avec 83,15 millions de FCFA et la Nafa avec 26,15 millions de FCFA. Quant à  l’Unir/PS, il se taille 23,6 millions de FCFA et enfin l’ADF-RDA se contente de  19,3 millions de FCFA. Cette subvention est régie  par la loi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales et du décret 2015-1364/PRES-TRANS/PM/MATD/MEF/MJDHPC du 20 novembre 2015 portant modalités d’utilisation de la subvention publique des activités politiques de campagnes électorales et hors campagnes électorales. Elle concerne les partis et formations politiques ayant obtenu au moins 3% de suffrages exprimés aux dernières élections législatives de 2015.

 

C’est donc une subvention régie par les textes. Et d’ailleurs, ce ne sont pas seulement les partis politiques qui bénéficient de subvention publique. La presse, les syndicats, les associations reconnues d’utilité publique,  et bien d’autres entités reçoivent des fonds publics pour financer leurs activités.  Seulement, ces décaissements ne provoquent pas autant de tollé que quand il s’agit des hommes politiques qui en bénéficient. Au-delà des justifications légales, la classe politique devrait se remettre en cause et chercher à comprendre la source de cette levée de boucliers. Quand il y a élection, ils passent à la caisse, quand il n’y en a pas, c’est pareil. Nos partis et formations politiques sont-ils nés pour fonctionner sous perfusion de l’argent du contribuable ? Ce contribuable qu’on presse à coup de taxes, à qui on demande de consentir des sacrifices encore plus, à qui on demande éternellement de serrer la ceinture…Tout cela pour que les dividendes profitent à une poignée d’hommes qui ont eu l’ingénieuse idée de fonder un parti politique. Plutôt une véritable entreprise engloutissant les deniers publics. Et finalement pour quels résultats ? Là est toute la question.

 

Il est dit que les  sommes perçues  doivent être utilisées pour les activités de formation politique des membres et sympathisants des partis et formations politiques, la couverture médiatique des évènements des partis et formations politiques, la tenue des instances statutaires des partis et formations politiques et l’édition et la promotion d’ouvrages sur l’idéologie politiques des partis et formations politiques, etc. Pour ce que nous savons, les couvertures médiatiques ne sont pas facturées. Ce sont les médias qui accompagnent les politiques pour donner écho à leurs rares activités. Mais aucune facture ne leur est adressée. Pourtant, ils devraient justifier les dépenses  auprès de la Cour des comptes dans seulement 4 mois. Bonjour les surfacturation et détournements! L’on comprend les sempiternelles querelles et les bagarres de positionnement dans les partis politiques. Plus l’on est proche des postes stratégiques, mieux l’on est servi. Les idées, les programmes politiques, l’animation de la vie politique, les avis éclairés sur la vie de la nation, ils n’ont que faire. Que la subvention tombe, c’est tout.

 

 

Stop à la saignée financière pour s’inspirer des bons exemples

 

Qu’apportent en réalité les partis politiques au vécu du citoyen des villes et des campagnes ? A ce Burkinabè perdu dans un trou à rat dans le sahel, dans les forêts de la Kompienga ? Il faut vivre pour s’intéresser à la politique. Mais ce citoyen n’est pas sûr que d’un moment à l’autre, il ne passera pas à la trappe des individus qui écument sa zone non sécurisée et abandonnée. Il ne pourra  pas voter, mais ce sont ses taxes qui alimentent des officines politiques qui peinent à mobiliser les électeurs pour voter. Mais, comme on le dit, quand il s’agit de chèques, opposition et majorité sont des caïmans de la même marre. Ils pataugent tous dans la même eau boueuse de l’insouciance du bien-être de l’électeur.

 

Ailleurs, ce sont les électeurs qui financent leurs partis ou formations politiques. Parce qu’ils se reconnaissent dans les idéaux défendus. Ils se saignent pour porter les idées de leurs champions quand il y a consultation électorale. Soit en finançant directement, soit en achetant des gadgets et autre produits qui permettent de renflouer les caisses. Les candidats eux, mènent des campagnes de levées de fonds et leur crédibilité se juge souvent en fonction de ce qu’ils auront pu mobiliser. Quand on est arriviste, sans un programme sérieux, personne ne versera une pièce de monnaie dans la sébile tendue.

 

Il y a certes la loi, mais il y a aussi l’esprit de la loi. Il est temps que les partis politiques en fonction de la conjoncture, acceptent de céder leur bouteille de champagne pour permettre à l’électeur de boire de l’eau potable.

Il y a certes la loi, mais il y a aussi l’esprit de la loi

Quand les citoyens de toutes parts crient face aux problèmes qui les assaillent,  et ce n’est pas une vue de l’esprit et nos hommes en costard et cravate doivent avoir la décence de renoncer à ce qui pourrait paraître comme un butin de braquage

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