Ouagadougou : 132 milliards de FCFA pour 4 échangeurs

Au-delà des débats qui le qualifie d’échangeur le plus grand de la sous-région, une chose est certaine. Ouagadougou tient depuis le jeudi 15 novembre 2018, son 4ème échangeur avec l’inauguration par le chef de l’Etat de celui du Nord. Ainsi, après le Sud, l’Est et l’Ouest, le Nord qui manquait pour que les quatre points cardinaux soient au complet, est désormais une réalité. Si on peut se réjouir de ce que ces œuvres architecturales contribuent sans doute à la fluidité de la circulation dans la ville de Ouagadougou et à son embellissement, on se pose rarement des questions sur les coûts que ces quatre infrastructures ont engendrés. De même que sur le choix entre quelques échangeurs et les grandes voix à bitumer à l’intérieur de la ville. 

 

Si depuis les indépendances en 1960 le Burkina Faso s’était contenté de routes simples dont la largeur ne dépassait pas sept mètres, avec l’évolution, il a fallu remédier à cette situation en entamant un vaste projet de construction d’une dizaine d’échangeurs dans la seule capitale Ouagadougou. Avec la mise en circulation de celui du Nord intervenue il y a de cela quelques jours, cela porte à quatre le nombre des infrastructures de ce genre au pays des hommes intègres.

Tout a commencé avec la construction de l’échangeur de Ouaga 2000. Cet ouvrage dont le démarrage des travaux est intervenu en 2002, a connu un ralentissement dans son exécution pour “manque de moyens financiers”. Il a donc fallu attendre 2008, soit six (06) après le lancement des travaux, pour que le tout premier échangeur de l’histoire du Burkina Faso soit ouvert à la circulation. D’un coût global de 12 milliards de F CFA, il a été entièrement financé par le budget national. Il convient de noter cependant qu’au départ, le projet devait être entièrement financé par la Libye de Mouammar Kadhafi. Mais dans les faits, ce pays n’a pris en charge que la réalisation du pont, qui a coûté à peu près un milliard de francs CFA. En forme de trèfle, l’échangeur de Ouaga 2000 est un ouvrage à deux niveaux. Il est constitué de quatre bretelles ou tourne-à-droite, qui donnent tous accès aux deux voies express. Il comporte également plusieurs bandes d’arrêt d’urgence.

Le deuxième échangeur, celui de l’Est, a été inauguré en 2010 après  environ trois ans de travaux. Il est le  plus petit des quatre en termes de coût. En effet, long de 2,7 km, cet échangeur a nécessité 8 milliards de francs CFA et a été financé par la Banque ouest-africaine de développement (BOAD). L’objectif qui a guidé la construction de cet échangeur était de faciliter la circulation aux gros porteurs et à ceux qui veulent rejoindre le nouvel aéroport, celui de Donsin qui est toujours en chantier. Cet échangeur, à trois niveaux, permet aussi d’évacuer le trafic et d’assurer un croisement sans feux de signalisation.

L’échangeur de l’Ouest quant à lui, est le troisième projet réalisé dans la ville de Ouagadougou. Cette gigantesque infrastructure a été réalisée grâce aux partenaires financiers qui soutiennent le Burkina Faso. En effet, le projet d’un coût de plus de 12,273 milliards de F CFA pour les travaux et de 780 millions pour le contrôle a été financé par un don du gouvernement japonais. Sa réalisation fut l’œuvre de l’entreprise Fadoul Tchnibois, sous le contrôle du bureau d’études AGEIM Ingénieurs Conseils. Ouvert à la circulation en décembre 2010 après trois ans (le lancement des travaux est intervenu le 1er février 2008) de travaux, l’échangeur de l’Ouest est constitué de deux passages supérieurs qui surplombent deux Ronds-points et interconnecté à l’échangeur de Ouaga 2000 par l’intermédiaire du boulevard des Tansoba. Il faut ajouter que cet échangeur a été réalisé en prélude à l’autoroute qui reliera Ouagadougou à Bobo- Dioulasso, la capitale économique. Cela permettra de développer le trafic entre ces deux villes. Du coup, il permettra de rendre plus rapide le transport des marchandises venant du port d’Abidjan. C’est dans cette logique également  qu’un port sec a été construit dans la ville de Bobo-Dioulasso.

Le Nord aussi voulait son échangeur

La construction des trois échangeurs (Est, Ouest et Ouaga 2000) pour environ 62 milliards de F CFA (travaux et entretien compris) sous l’ère de Blaise Compaoré a permis de fluidifier le trafic urbain dans ces quartiers. Celui du Nord qui a lui seul a

coûté la bagatelle de 70 milliards de francs CFA, devrait aussi permettre de mettre fin aux bouchons sur le pont Baskuy et améliorer l’accès aux communes de Tampouy et de Sig-Noghin, au Nord de la capitale burkinabè. Situé à l’intersection des routes nationales N°2 (Ouagadougou-Ouahigouya) et N°22 (Ouagadougou-Kongoussi), de la voie ferrée et à l’interface de deux barrages urbains, l’échangeur, le plus grand des quatre que compte la capitale, totalise 22 kms de voiries, quatorze ouvrages d’art, 12 000 m2 de mur de soutènement en terre armée et un canal de dérivation de 600 mètres (voir encadré). Il a fallu environ 35 mois  à l’entreprise SOGEA SATOM (le lancement des travaux a eu lieu le 4 décembre 2015) pour réaliser les travaux de l’échangeur du Nord. Le financement a quant à lui été assuré par le budget de l’Etat burkinabè, à travers un partenariat public-privé avec le groupe Bank of Africa. Comme nous l’avons déjà noté, la construction de ces échangeurs permet certes de fluidifier la circulation, de réduire le nombre d’accidents et d’embellir la cité ; mais  sachant qu’un échangeur coûte littéralement cher, (136 milliards pour les 4 échangeurs de la

capitale) on peut s’interroger sur l’importance relative de ces projets par rapport aux autres besoins du pays. Combien de kilomètres de routes bitumées dans la capitale pouvait-on par exemple réaliser avec ces 132 milliards ? Quels intérêts y a-t-il à rouler sur le « plus grand échangeur de l’Afrique de l’ouest» qui à coûter 70 milliards de FCFA, pour se retrouver ensuite à quelques mètres plus loin en train de rouler sur une voie cabossée, poussiéreuse et donc impraticable. Il faut revoir nos paradigmes du développement.

Encadré :

L’échangeur du nord en chiffres :

10 ponts de 40 à 75 mètres formant 3 échangeurs et 2 passages supérieurs sur voies ferrées ;

4 ponts cadres de 42 mètres sur le canal reliant les deux barrages ;

22 kilomètres de voiries revêtues en béton bitumineux ;

12,5 kilomètres de voies piétonnes en pavés ;

5 passerelles piétonnes de 30 à 45 mètres ;

877 mètres linéaires de dalots ;

10, 5 kilomètres de caniveaux de diverses sections ;

115 mètres de déversoir de type bec de canard sur le barrage N°1 ;

600 mètres de canal d’évacuation de 42 mètres de large ;

625 mètres de digues pour le barrage N°1

635 mètres de digues de protection pour le barrage N°2

 

 

L’échangeur du nord, c’est aussi :

2246 personnes ayant travaillé sur le chantier

6 000 000 heures de travail

1 700 000 m3 de matériaux transportés

5 500 000 kilomètres parcourus par les camions

24 300 tonnes de ciment utilisé

55 000 m3 de béton coulé

7 100 tonnes d’acier utilisé

 

Mesures sociales

300 000 000 FCFA investis dans la réhabilitation et la rénovation d’infrastructures socio-communautaires environnant :

4 centres de santé dont le CMA Paul VI

26 écoles primaires

5 collèges et lycées

Emplois générés

1 200 ouvriers, 110 cadres burkinabè et 40 expatriés

Le mode de fonctionnement de l’échangeur du nord

Partenariat Public-privé innovant, une première expérience dans les infrastructures routières au Burkina. La convention prévoit un remboursement au bout de dix ans dont trois de différé.

Le coût de réalisation est de 70 000 000 000 FCFA.

 

Source : Dossier de presse du ministère des infrastructures

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